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La procrastination

La procrastination est un sujet récurrent et qui touche beaucoup d’entre nous. Qui n’a pas eu envie de remettre à plus tard un travail difficile, de laisser de côté des tâches administratives peu avenantes, de différer le paiement de telle facture au point de dépasser le délai, d’ajourner l’occasion de parler à une personne à qui on a quelques chose de difficile à dire ? Qui n’a pas temporisé, hésité, été freiné par  une incapacité à décider, à agir ?

Qu’est ce que procrastiner ?

Chacun d’entre nous connaît ces moments où il remet à plus tard une tâche qu’il se promet de faire, un autre jour.  Quitte à ressentir, si cela se reproduit, une certaine mauvaise conscience. Le sentiment que ‘ce n’est pas bien’, qu’il ‘faut s’y mettre’, ne plus ‘laisser trainer.’ Les bonnes résolutions se mettent en place, pour rassurer un moment : ‘c’est sûr, je vais le faire demain, demain sans faute, je m’y mets’ . ‘Allez, je termine ce travail dans la semaine, promis, juré !’

Certains sont des procrastinateurs réguliers. Parfois, ils accumulent tellement de tâches non accomplies: courriers ou courriels non ouverts depuis des mois, rangement jamais réalisé, travail jamais terminé, décisions non actées, que des conséquences fâcheuses s’ensuivent, les plaçant dans des situations très délicates : impayés, désordre, sanction, stagnation, immobilisme, voire repli sur soi.

Et ces procrastinateurs finissent aussi par vivre un calvaire d’angoisses et de culpabilités. Car le surmoi s’en mêle : on n’est pas content de soi, on est encombré par l’ampleur de ce qui est à faire, ou par le désordre, on a une montagne devant soi et on n’a de moins en moins envie de la gravir.

L’idée de se mettre en mouvement peut ouvrir à de telles angoisses que l’on préfère fuir, quitte à augmenter l’accumulation, et donc la difficulté à agir!

Le cercle vicieux est en place. Une résistance s’installe, le fonctionnement s’enraye, et se répète.

Or, quand il y a un blocage,  la contrainte extérieure n’en vient pas à bout. La volonté n’y suffit pas.

Signification et hypothèses de la procrastination

Le mot procrastination vient du latin procrastinatio et signifie ajournement. Autrement dit, ‘renvoi à une date ultérieure’. Et même, plus précisément, ‘renvoi à demain’.

Procrastiner c’est différer, reporter, temporiser, ajourner, atermoyer, tergiverser. Tous ces verbes indiquent la présence d’une hésitation, d’une suspension, marquent un temps  entre maintenant et le moment d’agir.

Procrastiner, serait-ce demander un sursis ?  proposer un délai ? quémander un répit ?

La décision est prise : ‘je le ferai demain’ . c’est un soulagement, une fin en soi , une certitude. Un apaisement.

Ce report serait-il  un espace de vie, une respiration nécessaire ?  est-ce un désir d’échapper au temps, à l’horloge impérative?  est-ce un espace de liberté pour se hisser hors des contraintes, et contempler un moment le temps, sans y être soumis ? est ce un besoin de retrouver un rythme propre face à une vie organisée par l’extérieur ?

Le temps suspendu

Le procrastinateur imagine la réalisation du désir, et projette son accomplissement dans un futur proche. ‘Ce travail sera terminé demain.’ Or, parvenu à l’échéance qu’il s’était fixé, il ne démarre pas l’action envisagée, se tourne vers d’autres tâches, fait diversion, laisse le temps filer. Le désir n’est pas transformé en action.

Ainsi, le sujet ne demeure-t-il pas dans l’illusion d’être libre ? il ne s’est pas engagé, les possibilités sont ouvertes, devant lui, prêtes à être saisies.

Souvent,  des comportements addictifs ou compulsifs se mettent en place destinés au remplissage de ce temps qui n’est pas consacré à l’engagement dans l’action.

Qu’est ce que l’action ?

L’action permet d’extérioriser le désir, et de le confronter au réel. Pour agir,  une synthèse entre le désir et la réalité se constitue. Confronté au réel, le désir perd sa part d’idéalisation. Il libère aussi une part de sa charge énergétique. Psychiquement, cette libération entraine un vide, dans un premier temps, appelant un autre désir à se former. Est-ce la peur de ce moment de vide qui retient le procrastinateur d’agir ?

Pour agir, il faut choisir. La moindre action est une somme de choix, minuscules, qui en s’ajoutant, forment le mouvement d’ensemble.

Est-ce la faculté de choisir qui est en panne chez le procrastinateur ?

Ce qui est en jeu

Nos fonctionnements sont inscrits entre deux pôles complémentaires, indissociables, que sont l’activité et la passivité, le mouvement et l’immobilité; On peut y ajouter  la confrontation au réel et la fuite.

Le procrastinateur s’installe, pour une part de lui, dans  un retrait.  Sa résistance à l’action rappelle celle de l’enfant qui refuse d’obéir à une injonction, et tient fermement sa décision.  C’est une opposition très importante pour lui, très fondatrice.

Est-ce que le procrastinateur n’a pas pu exercer, enfant, son opposition ?

Est-ce que, de ce fait, il a besoin, adulte, de se protéger contre l’invasion de son espace psychique ?

La mauvaise opinion de soi

La tension entre le frein posé au désir d’agir et les injonctions ou reproches faits à soi-même entrainent un stress et une culpabilité. Cette pression exercée ne fait qu’ajouter au mal-être et durcit encore le positionnement de résistance. Le psychisme s’enferme dans la répétition.

‘La norme de notre société est fondée sur la responsabilité et l’initiative’, (Alain Ehrenberg, la fatigue d’être soi’)  La sensation d’être en décalage par rapport à ce courant dominant aboutit souvent à une démission à soi-même, une position de dépréciation de sa propre identité.

L’inhibition de l’action

Quelles sont les peurs liées à l’action ainsi remise, reléguée à un hypothétique lendemain ?

Ce peuvent être :

La peur de se confronter à ses limites, la peur de ne pas réussir, de ne pas  arriver au bout de la tâche.

Ou au contraire, la peur d’arriver au bout, de finir, de se trouver devant le mur de la finitude et son vide.

La peur de se concentrer,  de s’isoler dans une seule activité, de quitter la dépendance aux sollicitations sociales extérieures illimitées  (réseaux sociaux par exemple)

La peur de ce lendemain, celui où on aura le temps, mais que l’on remet  indéfiniment au lendemain

La peur de l’inéluctabilité du temps :la remise à plus tard dilate le temps indéfiniment, ne laisse jamais entrevoir la fin.

L’inhibition de l’action peut être aussi le signal d’une fixation à un stade de latence, où l’on ne nous demandait pas de choisir, où les responsabilités étaient moindres, où nos actions étaient encadrées par le milieu extérieur (parentale, scolaire) . La  peur autrement dit de cette extrême responsabilité et liberté de la vie adulte.

Ce peut être le désir inconscient de prolonger un âge où les actes ne portaient pas à conséquence, puisque quelqu’un d’autre accomplissait ce que nous ne faisions pas.

La difficulté à s’engager sur le long terme, sur une durée, semble assez  prégnant.

L’angoisse

Une angoisse profonde peut naitre de tels freins à l’action.

‘Mais l’angoisse était née de l’impossibilité d’agir.

Tant que mes jambes me permettent de fuir, tant que mes bras me permettent de combattre, tant que l’expérience que j’ai du monde me permet de savoir ce que je peux craindre ou désirer nulle crainte : je puis agir. ’ (Henri Laborit, éloge de la fuite)

Mais si aucune action n’est possible sur le monde, alors celui-ci apparaît comme inaccessible, et le sujet rentre en lui-même.

La perte et le sujet

La problématique du désir et de son accomplissement est au cœur de ce sujet. Le désir en s’accomplissant signe sa perte. C’est précisément ce que  permet d’éviter la compulsion à procrastiner : s’accrocher à l’objet du désir, ne pas le perdre pour ne pas se perdre.

L’enjeu est de se séparer de l’objet, ne plus faire un avec lui, de s’en détacher en acceptant  sa perte, sa destruction dans l’action. Et ne pas se sentir entrainé, en tant que sujet,  dans cette perte.

Tant que ce détachement n’est pas opéré,  l’action, en tant que perte de l’objet désir, peut être vécue comme un risque d’anéantissement du sujet lui-même.

La procrastination est-elle une pathologie ?

Le mot utilisé depuis quelques années dans les medias renvoie presque à l’idée de maladie. En termes psychanalytiques, c’est un symptôme, qui peut être léger ou invasif, associé à d’autres la plupart du temps. Le degré d’angoisse- et l’ampleur de l’empêchement à  vivre seront déterminants pour décider de s’en occuper avec un professionnel.  Il peut y avoir un état dépressif sous-jacent.

En littérature, un exemple de résistance à l’action est donné par le héros de Melville, Bartleby. Celui-ci, employé aux écritures dans une étude de juriste new-yorkaise, répond à toute demande sortant de son domaine strict, qu’est le recopiage des minutes (avant internet !) : ‘je préfèrerais ne pas’ une des traductions de ‘I would prefer not to’.  La formule est immuable, répétée de façon imperturbable par l’homme, et finit par s’étendre à toute action. Aucune agressivité, aucune animosité, ni mouvement émotionnel quelconque. Juste la phrase, jusqu’à l’immobilité totale.

En conclusion

La procrastination soulève les grandes problématiques inhérentes à notre société : problématique de la fragilité identitaire, du vide, de l’insaisissabilité du temps, de ‘l’initiative individuelle et de l’impuissance à agir’, ’la confrontation entre la notion de possibilité illimitée et celle d’immaitrisable’ (Alain Ehrenberg, la fatigue d’être soi).

 Références

Pour en rire et dédramatiser, un article de Marie Desplechins, savoureux : L’art de remettre au lendemain, l’express.fr

Melville, Bartleby, et autres nouvelles.

Henri Laborit : Eloge de la fuite

Alain Ehrenberg : La Fatigue d’être soi

 

Comment aller mieux ?

Pour aller mieux, la première étape est de savoir ce qui ne va pas bien

Explorer les conflits intérieurs, les nœuds, ce qui rend malheureux, ne pas le laisser de côté en disant: « ça passera. »

Interroger les signes du ‘je vais mal’: tristesse, déprime, manque de goût à vivre, addictions, comportements répétitifs, compulsifs.

Dans tous les cas, quelque chose à l’intérieur ronge, veut s’exprimer, n’est pas entendu. On s’est mis dans des impasses de vie, avec une situation professionnelle ou personnelle qui ne nous conviennent plus, une frustration permanente avec un  rêve inaccompli. On se sent en échec dans sa vie.

L’élément déclencheur, la prise de conscience du fléchissement du Désir est un repère.

Ensuite, commencer à suivre les fils conducteurs, les pistes de son intime:

  • Explorer ses émotions.
  • Explorer son enfance:  qu’est ce qu’on n’ a pas bien dépassé? quels sont les enjeux encore actifs?
  • Apprendre à se connaître : ses rêves, ses souvenirs, ses peurs et ses désirs.
  • Puis à partir de cette meilleure connaissance, l’action : comment améliorer sa vie, comment sortir d’une impasse, comment parler à quelqu’un, comment agir là où on est toujours resté pétrifié, comment sortir de ses inhibitions.

Cette partie action est indispensable, mais elle ne signifie pas qu’il faut agir à tout prix: L’action est une mise en oeuvre, un compromis, une synthèse. (Il y a aussi ceux qui doivent apprendre à ne pas agir, car pris dans une compulsion d’actions, signe de fuite.)

Aller mieux : quand l’être est en adéquation avec l’action.

Aller mieux: Ne pas continuer à s’adapter coûte que coûte sans jamais s’exprimer. Se familiariser avec ses zones d’ombre , pour ne pas continuer de vivre à côté de sa vraie vie.

La désorganisation de soi passe parfois inaperçue dans une vie en apparence très normalisée, les causes en sont alors profondément enfouies.

Exemple: « Si j’ai fait les études que ma famille a choisi pour moi , sans me poser aucune question à l’époque sur ce choix, je peux très bien me retrouver à 40 ans, malheureux de mon métier, en rébellion constante, mais m’obligeant à tout supporter, car j’ai femme et enfant, et appartement à payer. Si, de plus, ayant négligé ma famille par mal-être, j’ai peur de me retrouver seul parce que ma femme menace de me quitter, alors là, je suis au plus mal. »

Des réactions doivent avoir lieu avant, pour ne pas se laisser entrainer vers une spirale, dont on a ensuite beaucoup de mal à sortir.

Les conflits passés, non résolus, sont réactivés, dans le cas où des difficultés au présent sont en résonance avec ce poids encombrant. Le passé et le présent sont liés.

Le psychisme a une tendance naturelle à la répétition des mêmes comportements, autrefois érigés comme réponses à des stress, à des situations difficiles. Or, ces comportements ne sont pas appropriés dans les situations présentes. La façon d’agir ancienne, issue d’un modèle d’action élaboré dans le passé pour se défendre au mieux, pour se conformer au mieux, ne convient plus.

Le mal-être s’inscrit quand on se sent dépassé, quand on n’a plus l’impression de choisir mais de subir sa vie, quand on n’est plus « aux commandes ».

Exemple:« Je me mets toujours en échec quand j’ai une épreuve importante à passer. Pourquoi ? qu’est ce qui est en résonance ? Des remarques blessantes entendues dans ma jeunesse: « tu n’arriveras jamais à rien ». Je les entends toujours et je me mets en échec pour correspondre inconsciemment à ces paroles. »

Aller mieux: Reprendre un développement après une dérive ‘hors de soi.’

Peut-on changer ?

Notre rapport au changement est ambigu. Le changement attire et fait peur en même temps.

Le désir de changement

L’envie de changement est naturelle, saine : elle correspond à un besoin de renouvellement, un désir de mouvement, une curiosité à l’égard de l’inconnu, un élan vers une étape suivante, une énergie propulsée vers le futur.

Le changement est inhérent au monde du vivant. De l’apparition de la vie jusqu’à l’évolution des espèces, le développement de l’être, les organisations sociétales, tout obéit aux lois du changement. Qu’on le veuille ou non, rien n’est pérenne.

Dans notre vie, nous passons par différentes étapes, rencontres, âges. Les vacances, les voyages, c’est aussi pour changer. Le besoin de renouvellement est fondamental, et nous propulse vers l’accomplissement de nos désirs, de nos « missions ».

Les changements intérieurs  peuvent être activés par les modifications extérieures : Changer quelque chose, (déménager par exemple) c’est être conduit à repenser sa vie, à reconsidérer ses habitudes. Changer un élément de sa vie apporte un autre éclairage sur soi, permet d’activer d’autres parties de soi.

L’envie de changer peut aussi émerger dans une situation de mal-être, figée, stagnante. L’envie de changer vient parfois après un blocage dans le mouvement de la vie, lorsque l’immobilisme règne, ou que les frustrations supplantent le plaisir de vivre. Elle est le signe d’un renouveau possible, d’un élan de vie qui veut s’affirmer.

Mais on voudrait alors parfois changer complètement de vie, « envoyer tout bouler » et tout recommencer de zéro. Cela soulage de l’imaginer possible. Le vrai changement sera plutôt issu d’une suite de modifications internes. Une respiration propice au mouvement, à l’énergie de vie.

La peur du changement

A côté du besoin de renouvellement, nous avons un désir de conservation, un besoin de nous rassurer avec ce qui nous est familier. Nous aimons garder des objets, pérénniser un mode de vie, retrouver nos habitudes, notre confort, nous conservons ce qui nous rappelle le passé.. Nous voudrions parfois arrêter le temps, stopper le mouvement, pour garder les moments heureux. Comme si l’on pouvait retenir le temps ; l’empêcher d’’avancer. Photographier l’instant pour ne pas oublier, pour garder en mémoire. Vouloir pérenniser les moments fusionnels du début d’une relation, ne pas aimer passer à une autre étape. Regretter le temps du passé, être nostalgique. Ne pas vouloir grandir, ne pas vouloir vieillir…

Pourtant, la mémoire elle-même, par son fonctionnement en creux, avec ses oublis, ses flous, nous montre que rien n’est fixé de façon immuable. Tout bouge toujours autour de nous et en nous. Nos souvenirs fluctuent,  notre corps se modifie, notre psychisme est en constante interaction, receveur et émetteur. Est-ce pour cela que nous voudrions parfois arrêter le temps ? appuyer sur la touche « pause » pour nous reposer de cette avancée inéluctable ?

Accepter de changer c’est accepter de perdre certains repères, aller à la rencontre de  l’inconnu, lâcher un peu les rênes de la maitrise.  C’est accepter de quitter, de se renouveler, de se laisser porter par la nouveauté. Ce n’est pas toujours facile!

Par exemple, après plusieurs vécus d’échecs, la tendance est à ne plus bouger : « on ne m’y reprendra plus ». tendance au repli, au repos, bien naturel, le temps de reprendre force et courage !

Mais alors pourquoi le changement fait-il si peur ?

Le changement apporte avec lui un flux qui emporte, une instabilité. Il démarre par un passage mouvant, une perte d’équilibre. Il faut un peu de temps pour retrouver une nouvelle sécurité, reconstruire un équilibre. La peur du changement est liée à la peur de l’incertitude, de la perte des repères, inhérentes à toute situation en évolution.  La situation connue, même insatisfaisante, est rassurante parce qu’on y a posé ses jalons. Même quand on ne s’y sent pas bien, qu’on y est à l’étroit ; Les parois si proches, que l’on peut toucher de nos mains, nous rassurent par leur fixité, nous empêchent de nous aventurer vers ce que nous évitons et qui nous effraie !

Le changement peut être vécu comme un abandon, une solitude. On abandonne une partie de sa vie, on quitte les habitudes sécurisantes. on est seul dans sa prise de décision. On devient alors dépendant d’une situation, dont on se sent incapable de bouger. Cette peur est un obstacle au changement.

Que veut-on changer exactement ?

On peut, concrètement, rêver de changer de lieu de vie, de région, de pays. On peut rêver de changer de travail, de carrière, de partenaire. Rêver en somme d’avoir une autre vie. Car on estime s’être trompé. Avoir fait de mauvais choix, ou estimer que les choix antérieurs ne correspondent plus à nos désirs d’aujourd’hui. Mais ces changements, pour être bien menés, doivent être le fruit d’un travail psychique, d’une mûre réflexion, suite à des dialogues, une préparation, une maturation.

Parfois, un changement extérieur apporte un vrai soulagement, et peut être, bien sûr, nécessaire. On a tous expérimenté le fait de se libérer d’un poids en changeant, en quittant, en bougeant quelque chose à sa vie. C’est parfois une solution de survie, même !

Mais parfois, modifier le paysage extérieur ne change rien sur le fond ! on transporte avec soi le même fonctionnement, que l’on va retrouver avec le nouveau compagnon, dans la nouvelle entreprise, aboutissant alors aux scénarios à répétition.

Cela signifie qu’autre chose est en jeu. Cela signifie qu’il faut réfléchir au mode de fonctionnement mis en place qui nous conduit vers ces impasses.

On peut donc, plus subtilement, et plus efficacement, chercher à comprendre comment est organisée notre « économie psychique », de quoi est composé tel ou tel comportement habituel, quels sont nos désirs et nos peurs cachés derrière telle attitude.

La force des habitudes, la répétition laissent parfois penser qu’on ne peut rien y faire. Un sentiment de fatalité alors s’installe.

Or, rien n’est fatal. Beaucoup de fonctionnements se travaillent. La plasticité, l’adaptation, le travail psychique oeuvrent pour rendre le changement possible.

Qu’est ce que le changement comme processus de transformation ?

Une lente maturation intérieure conduit à la transformation effective. Ce changement-là ne se décrète pas, n’est pas le fruit de la seule volonté. C’est un processus de développement de vie, comme le passage de l’embryon au nouveau-né.

Il se fait en deux étapes : d’une part le processus interne: le travail psychique, les prises de conscience, la connaissance des mécanismes de fonctionnement. Ce processus met en œuvre l’activation psychique: sont activées les résonances entre les blocages d’aujourd’hui et les évènements ou périodes antérieurs de vie qui ont contribué à ériger ces blocages. Les ressorts émotionnels refoulés ayant permis la constitution des blocages sont alors accessibles. Et la détente peut s’opérer, les émotions se déchargent, n’encombrent plus l’espace psychique.

D’autre part, le processus externe: quand les prises de conscience ont eu lieu, les fonctionnements peuvent être modifiés. Mais cela nécessite encore un travail d’élaboration. En effet, les fonctionnements anciens sont ancrés, et obéissent à des réflexes inconscients. Déceler ces réflexes, et les situations qu’on a cherché à fuir, permet  d’agir pour changer.

Le changement nécessite d’être mis à l’épreuve de la réalité, corélé au réel. Sinon, le désir de changer reste  à l’état de virtualité, non réalisée.

Le changement est motivé, poussé, par le désir d’agir. C’est donc bien le désir d’agir, qui, une fois les peurs et les blocages compris, explorés, émergera. En fait, il s’agit de choisir comment surmonter les peurs, et exercer son potentiel créatif et sa capacité à choisir de façon à s’ancrer dans le réel.

En même temps, le vrai changement n’est-il pas ce mouvement vital que l’on laisse vivre en soi, et au travers de soi ? cette énergie qui circule librement, plus entravée par les nœuds bloquants ?

Mais si l’on change, c’est lentement, doucement, par petites touches. Comme un tableau impressionniste. Changer un mode de fonctionnement inadapté, inefficace, voire contraignant, se déroule à plusieurs niveaux, progressivement.

La psychanalyse aide à prendre conscience de ce qui bloque l’évolution. A prendre ou reprendre son rôle de sujet qui trace sa route. Un sujet responsable, qui s’épanouit dans son essence d’être, tout en satisfaisant aux obligations nécessaires et vitales de son existence sociale, matérielle, familiale.

La capacité à se transformer, à évoluer peut être entretenue par le travail psychique. Et dans ce cas, tout au long d’une vie, les transformations auront lieu, internes et suivies d’actions, permettant d’exprimer son potentiel de vie.

Prendre soin de son « moi »

Si l’on a souffert d’un sentiment de ne pas être reconnu, ou d’incompréhension. Si on s’est senti rejeté, injustement traité. Si l’on a subi des traumatismes, des manques affectifs, si l’on n’a pas vécu une enfance épanouissante, ou si l’on a vécu une cassure venant briser le centre de soi…si l’on a entendu des cris, si l’on a été négligé, si l’on ne sait pas pourquoi on était là..

Toutes ces expériences créent des blessures immenses, dont la souffrance est enfouie. Cependant, le refoulé ne disparaît pas, il est toujours agissant. Le psychisme n’oublie rien. L’individu alors s’enferme dans une carapace, créant des comportements de défense, vis-à-vis de ces blessures. Il construit des attitudes de rigidifications, visant à éviter à tout prix de se confronter à toute situation risquant de réveiller la peine issue de l’élan brisé. Pour ne pas souffrir à nouveau. Ainsi, il va vivre à côté de lui, n’étant pas lui-même, pas totalement lui-même.

« Ces diverses expériences de non reconnaissance amènent un être à conclure qu’il ne peut pas vivre en étant lui-même. Le sens profond de la maladie est là, presque toujours. (Guy Corneau, Revivre !)

Un trouble va naitre. En effet, cette partie de soi oubliée, négligée, dont on n’a pas pris soin, va s’étioler, se désagréger.

Le prix à payer, est la maladie, d’être ou de corps.

La maladie montre une désunion d’avec soi, un déséquilibre. L’harmonie qui préside est rompue.

L’être est globalité avant tout.

C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de prendre soin de soi.

Quelle que soit l’entrée : corps, énergie, psychisme, la technique sollicitée, le professionnel consulté, tout travail sur soi permet de prendre un peu de recul et de se rendre compte que l’on peut améliorer sa vie, la rendre meilleure.

Il s’agit aussi de savoir manœuvrer les forces en soi qui sombrent, qui ne veulent pas évoluer, voire qui œuvrent en sourdine pour la destruction !

Ne pas les laisser dans l’ombre, ni aux commandes.

Il s’agit donc de réveiller les forces de régulation, de réparation, qui se sont endormies, inhibées suite aux traumas vécus.

En effet, toute guérison, toute amélioration d’être, est due à l’activation de l’auto-guérison, à la stimulation de la capacité autonome de rééquilibrage propre aux  fonctionnements psychiques et physiques.

La reconnaissance, en soi, pour soi, des souffrances niées et enfouies est la condition première pour commencer à être vraiment soi.

Toute souffrance intense et durable engendre une dissociation psychique. Une partie du psychisme fait comme si l’autre partie, la souffrante, la malade, n’existait pas. Celle-ci s’enferme dans le non-dit. Une barrière invisible l’entoure et l’empêche d’être au jour. Avec elle, c’est une part de soi qui s’isole et s’anéantit.

Le dialogue avec l’inconscient est nécessaire pour faire réunir ces morceaux disparates de la psyché.

La psychanalyse permet la fluidité entre conscient et inconscient. Elle place la reconnaissance du sujet au centre de son dispositif.

La faculté de réparation provient du sujet lui-même, de sa renaissance à lui-même, dans une place enfin occupée.

C’est une thérapie par la mise en valeur du moi.

Un moi qui s’est ouvert et a quitté ses compulsions de défense, qui l’enfermaient dans une attitude figée. Un moi qui n’est plus replié sur ses peurs.

La fluidité apporte le mouvement, la possibilité de l’action. Elle permet à la force vitale, au désir de vie de se propulser à l’extérieur. Sans cette fluidité, des cuirasses psychiques, et physiques se mettent en place.

Un moi qui occupe le centre de l’être, et peut regarder autour de lui avec bienveillance,  inter-agir en combinant indépendance et accomplissement, se relier en gardant sa liberté d’être.

« La santé est globale, elle inclut le corps, l’âme et l’esprit. » (Guy Corneau, Revivre.)

Il s’agit de découvrir le sens de ce qui nous arrive. Un sens est découvert quand il parle à notre conviction profonde, intime. Cela arrive comme un éclairage subit, suivi d’un soulagement émotionnel. La conscience s’enrichit. A chaque situation, à chaque évènement ne correspond pas un mais plusieurs sens. Ils sont à cueillir au fur et à mesure de l’avancement, et viennent se mutualiser, renforcer l’élaboration globale.

Le chemin vers les prises de conscience, en ramenant du mouvement intra et interpsychique, conduit à la sortie de l’impasse où nos peurs nous ont enfermés. Une nouvelle circulation s’instaure, ce qui était fixé se dénoue, la vision des choses en est modifiée.

Suite à ce travail de conscientisation, l’harmonie entre ressenti et action est rendue possible. L’action juste, issue de la synthèse entre le ressenti et la réalité extérieure, ancre le sujet dans sa vie. Elle lui permet l’incarnation de ce qu’il est vraiment.

Comprendre l’angoisse

Qu’est ce que l’angoisse ?

Parfois elle est un mal qui ronge, une souffrance qui étreint l’être, qui l’empêche de vivre.  Parfois elle est source d’action, de créativité, elle mobilise l’énergie. Elle signale un travail psychique, des difficultés à surmonter une épreuve, ou un mal-être de longue haleine.  L’angoisse est difficile à expliquer, à exprimer.  Elle habite tout être humain.

L’angoisse se différencie de la peur : la peur se manifeste devant un danger réel, présent. L’angoisse est une souffrance purement mentale, alors qu’aucun danger concret et extérieur n’est à affronter. Une peur intérieure provoque l’angoisse, qui pousse à anticiper le pire, qui donne à considérer la face sombre de la vie, qui déforme la réalité pour n’en voir que l’aspect négatif, alimentée par une imagination fertile.  Cependant, elle est toujours liée à une difficulté de la vie réelle.

Elle arrive parfois après une épreuve de la vie, ou dans un contexte de stress intense et ininterrompu. Parfois elle émane d’une histoire de vie tourmentée, hantée par les manques, les blessures. Réveillée par une cause actuelle, elle résonne avec des vécus antérieurs qui amplifient sa force.

Qu’est ce qui nous angoisse ?

Les expressions en sont nombreuses: L’angoisse de l’avenir, de la  mort, l’angoisse du non-sens de la vie.. L’angoisse du vide, de la solitude. L’angoisse de l’abandon. L’angoisse du rapport aux autres. L’angoisse de la sexualité. L’angoisse de la fin de toute chose, du monde…l’angoisse de vivre, tout simplement. L’angoisse du changement, l’angoisse de l’immobillité… la déclinaison est infinie…les motifs d’angoisse sont nombreux !…Parfois elle est diffuse, on ne saurait même pas dire de quoi elle est constituée…

Nous ne manquons pas de sujets extérieurs alimentant nos propres angoisses déjà présentes : Que ce soit dans le domaine des bouleversements écologiques, ou humains, les scénarios catastrophes sont légion et nous font penser au pire en permanence.

Quelles sont les manifestations de l’angoisse ?le cri de munch

Les manifestations de l’angoisse sont bien connues de ceux qui les éprouvent : boule au ventre, serrement de gorge, troubles de l’appétit, insomnies, idées sombres, désespoir, idées obsédantes. Agitation ou au contraire prostration…Envie de s’étourdir pour tenter d’oublier l’angoisse ou au contraire désir de s’isoler, pour tenter de la combattre.  Chacun sa gestion de l’angoisse…

Le plus souvent, l’angoisse est dificile à indentifier. Ce mal-être diffus qui pousse vers des fuites en avant ou des retraits n’apparaît pas toujours en termes très clairs. Il est à explorer avant d’y mettre le mot « angoisse ».

L’angoisse est un cri.

A quoi sert l’angoisse ? faut-il l’éviter à tout prix ?

L’angoisse est parfaitement normale. En tant qu’alerte, elle oblige à être vigilant.  C’est en réalité, un « signal  vital de détresse ».   Sans elle , les dysfonctionnements et  les déséquilibres perdurent, ce qui risque d’entrainer vers des phénomènes dététères (maladies, dépression..)

L’angoisse ressentie doit être considérée comme un signal d’alarme, afin de nous interroger sur les dysfonctionnements de notre vie:  » Que se passe-t-il actuellement dans ma vie, qu’est ce qui n’est pas équilibré, qu’est ce que je fuis, quelles décisions je prends, ou je ne prends pas.. »  Ces questions sont à étudier, afin de chercher le sens de ce signal d’un danger intérieur.

Le psychisme, comme tout système, cherche à maintenir une homéostasie, c’est-à-dire un équlibre entre ses différentes instances (moi, ça, surmoi) et la réalité extérieure. Si  cet équilibre est rompu, le psychisme, pour ne pas perdre son intégrité, travaille à maintenir sa cohésion menacée. L’angoisse est produite par ce travail intense de la fonction régulatrice du psychisme.

Les dangers psychiques sont invisibles à l’œil nu, mais sont pourtant à l’origine de tous nos comportements. Le moi cherche en permanence à maintenir sa cohérence, son intégrité.

Chacun cohabite différemment avec ses angoisses. Pour ne pas plonger, de nombreuses stratégies existent. Et poussent à des comportements destinés à masquer, à s’éloigner du ressenti d’angoisse. L’exemple des addictions est un des plus courants : le comportement addictif de consommation en excès (quel que soit le produit ou le comportement) entraine une diminution des sensations corporelles.  L’addiction anesthésie l’éprouvé.  Et permet d’échapper aux ressentis.

Cependant, les angoisses refoulées sont des  plus dangereuses. D’une part parce que leurs causes restent cachées, puisque l’alerte n’est pas entendue. D’autre part, car, refoulées elles n’en demeurent pas moins agissantes,  génèrant un stress permanent et destructeur.

Et surtout, on évite la confrontation avec soi-même, avec son histoire, avec ses démons. On se coupe de son socle. De ses émotions. De sa vraie vie.

Peut-on apprivoiser son angoisse ?

Il est nécessaire de connaître les causes de l’angoisse, par une recherche introspective. De les visiter, de les appréhender. Pour, en les comprenant mieux,  moins en souffrir.

L’attention à l’angoisse ressentie permet de créer des repères, des sentinelles.

Tout d’abord repérer le moment où elle est apparue. Cela permet de réfléchir à la cause actuelle. Qu’est ce qui l’a provoquée ? et surtout, au-delà de la situation ou de l’évènement, se poser la question de  savoir comment on a vécu cette situation, quelles étaient les émotions ressenties, les souvenirs associés …

Et retrouver les souvenirs anciens, véhicules de blessures affectives, les passages difficiles, les périodes troublées, les enfances chagrines, les adolescences un peu perdues….

Affronter ses craintes, ses peurs, sans détours, trouver ses failles, se confronter à ses démons intérieurs, sont des nécessités si l’on veut apprivoiser son angoisse, et en sortir apaisé. La psychanalyse est le traitement qui permet ce travail.

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L’estime de soi

On parle beaucoup de l’estime de soi, des ouvrages lui sont consacrés.
On en parle surtout pour dire qu’on en manque.
Sans doute parce que cette estime n’est pas facile à créer, à développer, et qu’elle est souvent malmenée, voire détériorée par la vie, l’éducation.
On en ressent le manque: mais comment définir, mesurer ce que serait le plein d’estime de soi ?

Avez-vous une bonne ou une mauvaise estime de vous ?

Essayons quelques questions :
• Etes vous affirmé dans votre vie, savez-vous dire non, vous opposer à quelqu’un ?
• Savez-vous aussi dire oui, avec détermination, pour vous lancer dans un projet, une nouvelle action, un nouveau partenariat ?
• Savez-vous déterminer, lister quelques-unes de vos qualités ?
• Avez-vous une confiance en vos compétences, une bonne opinion de vos talents, de votre physique, de votre intelligence ?
• Etes vous contents, lorsque vous avez agi, fait un travail, êtes vous satisfait de vous, de votre réalisation?
• Etes vous rassuré, quand vous vous préparez à une tâche, avec un enjeu ? savez vous mobiliser votre confiance en vos capacités à mener à bien le projet ?
• Vous acceptez-vous tel que vous êtes, sans jamais avoir envie de ressembler à une autre personne, admirée pour toutes ses qualités que vous estimeriez ne pas posséder vous-mêmes ?
• Vous connaissez vous bien, avez-vous fait un travail sur vous, êtes vous conscient de votre histoire, avec le sentiment d’un socle solide ?
• Avez-vous un sentiment de fierté vis-à-vis de vous-mêmes, ou de votre famille ?
• Acceptez vous vos défauts comme faisant partie de vous, sans honte, ni gêne, ni déni ? les reliez vous à vos qualités, en disant : ça forme un tout ?
• Vous sentez vous capables de vous améliorer dans ce que sont vos points faibles, et de développer vos qualités ?

Ces questions peuvent vous amener à estimer… votre estime de vous !
Si vous avez répondu oui à une majorité de questions : vous avez donc une bonne estime de vous-même.
Par contre, si vous répondez en majorité non aux questions ci-dessus : vous pouvez vous ranger parmi les personnes doutant d’elles-mêmes et à faible estime de soi.

Alors, quand disons nous : j’ai une bonne estime de moi ?

Qu’est ce que l’estime de soi ?

Disons pour commencer, qu’une bonne estime de soi est une question de mesure et d’équilibre.
S’estimer, c’est s’aimer suffisamment, lucidement, sans excès de narcissisme. C’est se sentir digne de respect, et se défendre contre le manque de respect lorsqu’on y est confronté.

Avoir une bonne estime de soi, c’est aussi se sentir bien avec soi, se considérer positivement, en ayant fait le tour de qui on est. Sans se raconter d’histoires, ni se croire au-dessus, ni se penser au-dessous.
C’est savoir mettre en valeur la personne que l’on est, sans se comparer à d’autres, sans dévaloriser ni écraser de mépris les congénères !

Et enfin, c’est aussi agir avec une confiance correcte en ses moyens d’actions, et ne pas craindre de transformer son potentiel en action.
C’est se projeter avec une bonne opinion des capacités que l’on souhaite mobiliser et confiance en elles.

Ainsi l’estime de soi permet d’agir. Ceux qui sont bloqués dans leur capacité d’action ont souvent une faible estime d’eux-mêmes.

A quoi mène une mauvaise estime de soi ?

Inhibition de l’action.
Dans l’action, le sujet à faible estime de soi se pose de nombreuses questions : vais-je réussir ?suis-je fait pour cela ? est-ce que quelqu’un d’autre ne serait pas meilleur à ma place ? dois-je commencer maintenant ou plus tard ? est-ce que j’y vais ou je me prépare encore un peu ?
L’action est souvent inhibée. Le doute envahit et bloque le mouvement.

Frustrations
Le sujet en mauvaise estime de lui se sent dévalorisé, incapable de changer, de donner un nouveau cours à sa vie. il est en permanence dans la frustration de ne pas vivre la vie qu’il voudrait.

Soumission
Plus insidieusement, la faible estime de soi peut entrainer l’acceptation d’une situation désastreuse. Subir une relation destructrice, parfois sans s’en rendre compte, rester dans un emploi médiocre. Cela peut aboutir à ne plus se donner  suffisamment de valeur pour songer à changer quoi que ce soit à sa vie, et conduit de fait à accepter l’inacceptable.

Pourquoi avoir une mauvaise estime de soi?

Les causes d’un manque d’estime de soi sont liées à l’éducation, au rôle de l’entourage, familial ou scolaire, parfois.
Si on remonte dans l’enfance :
Souvent, de mauvaises appréciations répétées, des brimades, des colères autour de l’enfant, qui se culpabilise et se rend responsable de ce qui ne va pas.
Mais aussi un manque de stimulation, une sorte d’indifférence de la part de l’entourage, le sentiment d’occuper une place un peu transparente.
Une culpabilité liée à une situation mal acceptée : parents en conflit, déséquilibre familial, secret, silences etc.
Un choc, un grand changement, une instabilité, un sentiment d’abandon agisssent aussi directement sur l’estime de soi.
Le manque d’autonomie accordée à l’enfant, la faible transmission des apprentissages, le frein mis à le laisser vivre des expériences.

L’effet négatif enfin de la grande admiration pour l’enfant, proférée de façon excessive et non réaliste, quand elle n’est pas fondée sur de réelles qualités mises en oeuvre et les efforts couronnés de succès.

 

Il y a aussi un aspect social au manque d’estime généralisé.
Nous baignons dans un ensemble de conditionnements et de lieux communs, qui ne facilitent pas la prise de conscience de sa valeur.
Par exemple, le terme échec, trop souvent attribué à toute action ne donnant pas un résultat tel qu’on l’imaginait.

Une dépréciation de soi et une mauvaise image résultent des difficultés, des ralentissements, des baisses de motivation, etc… que chacun, pourtant, traverse dans sa vie. Les phases de burn out,les besoins de faire une pause, les désirs de changement de vie, les choix personnels et non uniquement guidés par la raison sont  quasiment vécus dans la honte. Une société très individualiste telle que la nôtre s’enferme sur un grand nombre de diktats non-dits et arbitraires inhibant l’initiative individuelle.
Autre exemple : Par peur et repli général, rares sont les milieux professionnels acceptant de faire confiance, simplement, à quelqu’un. Chaque candidat à l’emploi doit montrer patte blanche, polir un CV impeccable, justifier le moindre changement, le plus petit flottement…

Comment augmenter son estime de soi ?

Certains psychologues, comme Alfred Adler, pensent que l’individu ressent naturellement un complexe d’infériorité, depuis la petite enfance, grâce auquel il cherche à grandir, évoluer, s’améliorer. En effet, poussé par ce sentiment d’être inférieur, chaque individu accomplit multiples apprentissages et efforts pour être à la hauteur de ses objectifs, pour agir, se mouvoir, s’élever.
Autrement dit, l’estime de soi n’est pas innée, elle est à conquérir.
Il est illusoire de penser qu’elle est acquise une fois pour toutes. Une tâche accomplie, on est content. Un nouveau travail, et on remet en question sa compétence, on rétrograde un peu, pour accomplir les efforts indispensables.
L’estime de soi est fluctuante : elle peut varier d’un moment à l’autre, d’un enjeu à l’autre. Elle est un travail permanent. Il faut l’alimenter, s’en occuper, sinon il sera difficile de la maintenir à un bon niveau.
Pour veiller à un maintien correct de l’estime de soi, il faudrait considérer les sentiments d’insuffisance, d’imperfection, non comme des faiblesses, mais au contraire comme des moteurs pour aller de l’avant, pour atteindre un objectif.
Veiller à ce que ces sentiments ne soient pas soumis aux assauts de la culpabilité par exemple ou de la frustration. Par exemple, ne pas se fixer sur une idée contraignante et illusoire d’un idéal très élevé et inatteignable, car non réaliste.

L’estime de soi est liée au sentiment d’amour que l’on reçoit. Bien sur, si on ne se sent pas aimé, on peut difficilement s’estimer.
L’estime de soi grandit dans l’éducation, destinée à rendre socialement aimable, compétent, adapté aux codes existants.

Ainsi on pourrait dire que pour augmenter son estime de soi, un travail est nécessaire sur plusieurs plans :

-le rapport à soi : apprendre à se connaître, se regarder, réfléchir aux qualités et atouts que l’on a, faire un point sur le parcours accompli.
Faire une liste de ses désirs, ceux qui permettraient d’améliorer sa vie, et, en face, une liste des peurs à accomplir ces désirs. Et aussi apprendre à reconnaitre ses besoins profonds, et ce que l’on apprécie en terme d’équilibre de vie. Se reconnaitre, comme individu parmi les autres, avec ses spécificités, ses particularités, avec sa propre histoire, son parcours différent.

-le rapport aux autres : soigner son relationnel, regarder les autres, apprendre aussi à mieux les écouter, les connaître, s’occuper du lien avec eux.

-le rapport à l’action : réfléchir aux blocages, aux immobilismes, aux freins. Se dégager des croyances inhibant l’action, s’il y en a : tu n’y arriveras pas, c’est difficile, la filière est bouchée, tu n’es pas assez bien, etc. Accepter les erreurs, les siennes, et celles des autres.

Le développement de sa personne est un travail, une lente appropriation d’équilibre et de sagesse.

Il peut être nécessaire de se faire aider pour cela.

Bibliographie :
Christophe André, François Lelord : L’Estime de soi
Alfred Adler : Le sens de la vie